Lutter efficacement contre les locations abusives sur airbnb

Postulat déposé au Conseil communal de Lausanne le 28 mars 2023

Postulat

Lutter efficacement contre la soustraction de logements au marché locatif : stratégie municipale de contrôle et de sanction contre les locations de courte durée illégales

Problèmes engendrés par la multiplication des locations de courte durée

La location de courte durée de logements ou de parties de logements a toujours existé, notamment sous la forme de la sous-location réglée dans le droit du bail, qui peut valoir pour une chambre ou une partie d’un appartement, ou pour un logement entier. Au cours de la décennie écoulée, l’émergence de plates-formes en ligne telles qu’airbnb a permis le développement du logement chez l’habitant, en particulier pour les touristes ou les personnes en séjour de courte durée. Cette évolution est fondamentalement positive et peut permettre un usage plus rationnel de logements qui seraient par exemple sous-utilisés ou vides à certaines périodes. Elle correspond à l’esprit originel de l’ « économie du partage ».

Cependant, ces plates-formes ont également favorisé l’apparition d’une offre de logements destinés uniquement à la location de courte durée avec des services annexes. Des appartements entiers ne sont ainsi plus loués à des ménages souhaitant s’établir à Lausanne, mais uniquement à des personnes en séjour de courte durée. Les prix pratiqués permettent de dégager un rendement massif, bien supérieur à celui qu’autorise le droit du bail, tandis que la soustraction de ces logements du marché locatif normal fait baisser le taux de vacances et augmenter les prix pour tout le monde. Ce sont des acteurs immobiliers à but lucratif qui mettent à disposition ces offres. En conséquence, il devient de plus en plus difficile de se loger à Lausanne, en particulier dans les catégories de logement le plus souvent présentes sur les plates-formes, soit les appartements de 2 à 4 pièces environ. 

Les règles applicables

Depuis la mi-2022, de nouvelles règles sont en vigueur dans le Canton de Vaud pour les locations de logements de courte durée, notamment celles qui sont proposées par l’intermédiaire de plates-formes en ligne telles que airbnb ou abritel. Ces règles sont inscrites dans la Loi sur l’exercice des activités économiques (LEAE) et sont les suivantes :

Les communes sont chargées de l’application de ces dispositions. A ce stade, la Ville de Lausanne n’a pas défini d’organisation ni alloué de ressources au contrôle de ces dispositions légales. On ne peut hélas pas attendre des plates-formes qu’elles se conforment spontanément au cadre légal. On trouve d’ailleurs très facilement plusieurs annonces qui ne sont manifestement pas conformes.

Les amendes prévues par la loi peuvent aller de 20’000 francs à 50’000 francs en cas de récidive.

Il faut noter que plusieurs cantons suisses disposent d’une législation similaire adoptée récemment. La ville de Lucerne a, le 12 mars 2023, adopté la même règle que le canton de Vaud par une majorité très nette de 65 % des voix exprimées. De nombreuses villes européennes ont pris des dispositions très sévères de restriction pour préserver leur parc locatif.

Situation à Lausanne

Selon le site indépendant insideairbnb.com, 1278 offres sont disponibles sur la principale plate-forme qu’est airbnb à Lausanne. 66%, soit deux tiers ou 850 unités environ, concernent des appartements ou maisons entiers. 42.5 % du total est le fait de loueurs qui proposent plusieurs locations, ce qui augmente la probabilité qu’il ne s’agisse pas d’habitants sous-louant tout ou partie de leur propre logement, mais de professionnels. Au vu du taux de vacance actuel, le nombre de logements vacants à Lausanne peut être estimé à environ 300.

En annexe de cette interpellation figurent quelques offres trouvées sur le site airbnb pour des séjours d’une centaine de nuits, avec deux appartements de 2,5 pièces proposés à 4340 CHF par mois (ou « seulement » 3038 CHF par mois après rabais !) et à 4786 CHF par mois (ou 4310 CHF après rabais), ou un 3,5 pièces à 6189 CHF par mois. Ces logements sont situés dans des quartiers résidentiels. Il s’agit donc manifestement d’offres contraires à la loi. De toute évidence, la plate-forme accepte ces annonces sans se soucier de faire appliquer le cadre légal en vigueur.

Sur sa page d’informations consacrée aux règlementations locales d’airbnb, la loi vaudoise n’est pas même mentionnée, pas davantage que l’obligation de payer la taxe de séjour. C’est un indice de plus de l’absence de toute volonté de la part de ces intermédiaires d’assurer la conformité de leur offre. L’attitude non coopérative d’airbnb est malheureusement connue : comme l’indiquait le journal Le Monde en 2021, «  la plate-forme a longtemps ferraillé en justice face aux collectivités qui cherchaient à encadrer ses pratiques »[1].

Demandes

Il faut constater qu’à Lausanne, la loi cantonale n’est tout bonnement pas appliquée. Et il n’est pas possible de compter sur une supposée bonne volonté des plates-formes. Il est donc grand temps de faire appliquer réellement le cadre légal pour protéger le parc locatif lausannois.

Le présent postulat demande donc à la Municipalité de formuler des propositions sur les points suivants :

Le 28 mars 2023

Benoît Gaillard (PS)

 

 

 

 

[1] https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/17/la-grande-offensive-des-villes-contre-airbnb_6106394_3234.html